Amnon Jacob Suissa, Université du Québec à Montréal

 

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Résumé

La médicalisation des comportements liés aux dépendances est de plus en plus une avenue privilégiée dans les modalités de gestion et de contrôle social. Dans ce contexte, les mouvements d’entraide anonymes axés sur les 12 étapes exercent une influence considérable dans la conception du phénomène des dépendances et des interventions à privilégier. Au plan scientifique, ce discours s’appuie sur certaines normes : impuissance, abstinence, perte de contrôle, maladie progressive, croyance à un plus grand pouvoir, anonymat, etc. Fortement disséminées dans la sphère sociale élargie, ces normes sont appliquées à d’autres conditions sociales comprises comme des maladies : dépressifs, narcotiques, gamblers, obèses, dépendants sexuels, internautes, acheteurs compulsifs, anorexiques, endettés, etc. Comment s’effectuent les passages d’une condition sociale et des comportements de dépendance à un statut de maladie, de pathologie? Sur quelles bases scientifiques et idéologiques s’appuie le discours qui permet l’actualisation de ces conditions pour les rendre plus acceptables, voire plus désirables au plan social? Y a-t-il des pratiques du social qui s’inscrivent en faux face à cette médicalisation poussée des problèmes sociaux? Face à ces questions, et à partir d’une analyse sociale critique, l’auteur propose d’identifier les repères importants dans la construction sociale de ce discours. Aux pratiques qui confinent l’individu dans un certain déterminisme (une fois dépendant, toujours dépendant), l’auteur suggère un contre discours axé sur des pratiques sociales qui favorisent le DPA (développement du pouvoir d’agir) des personnes et de leur réseau social.

 

Mots-clés

dépendance, développement du pouvoir d’agir, mouvements d’entraide anonymes, intervention, changement social.

 

Abstract

Medicalization of addictive behaviors is more and more a privileged path of social control. In this context, the 12-step philosophy exercice a considerable impact on the conception of the addiction phenomenon and the intervention process. On a scientific level, the AA philosophy discourse is based on the following arguments: powerlessness, abstinence, lost of control, progressive disease, etc. On what premises a social condition like an addictive behavior becomes a pathology and a disease? Are they alternative practices to this medicalization process of social problems? To these questions, and from a critical social perspective, the author proposes to analyze some important markers in the social construction of the disease discourse and to present alternative markers based on empowering individuals and their social network.

 

Keywords

addiction, empowerment, 12-step groups, intervention, social change