Thème
Faire plus avec moins : Comment sortir de cette injonction paradoxale?
Au cours des dernières années, plusieurs changements ont exercé une influence dans le quotidien des intervenants sociaux. Le développement des technologies et la mondialisation des marchés, la prédominance des thèses du néolibéralisme (Chopart, 2003; Mayer, 2002), la compétitivité accrue des entreprises, l’augmentation du travail atypique et précaire (Paugam, 2004) se sont concrètement traduits par l’exclusion d'une partie importante de la population ainsi qu’une marginalisation sur le plan socioéconomique (Castel, 2007). Ces changements ont aussi des impacts sur les politiques sociales. Dans plusieurs pays occidentalisés, on assiste au déclin de l’État providence (Breton, 2002; Vilbrod, 2003). Tous ces éléments concourent à construire un discours d’individualisation des parcours qui se traduit dans les pratiques d’accompagnement. Dans ce contexte, les intervenants sont invités à adopter une pratique de plus en plus standardisée (Castel, 2007; Leveridge, 2003 ; Mayer, 2002) qui ne correspond pas nécessairement au type de soutien recherché par les personnes. En plus de soulever des questionnements importants sur le plan éthique (Bouquet, 2004), la détérioration des conditions de pratiques confronte les intervenants à plusieurs obstacles sur le plan organisationnel en plus d’une perte de sens de leur travail. La précarité des ressources peut aussi exercer une pression constante sur les intervenants qui sont confrontés à une augmentation des demandes de soutien dans des délais plus courts et en bénéficiant de ressources de plus en plus limitées (Chopart, 2000; Mayer, 2002 ; Vilbrod, 2003). Faire plus avec moins, comment sortir de cette injonction paradoxale ? Plusieurs auteurs suggèrent de s’intéresser à l’expérience développée par les intervenants dans le cadre de leur pratique où ils ont à composer avec des situations complexes (Lloyd, 2007 ; Lysack, 2005 ; Oudshoorn, 2005). Quelles stratégies sont développées par les différents acteurs au sein des milieux de pratiques ? D’autres suggèrent de s’intéresser aux contextes dans lesquels les personnes partageant des enjeux communs se regroupent, réfléchissent à leur situation pour en dégager une signification nouvelle et poser des actions (Breton, 1999 ; Carr, 2004). Comment s’organisent les personnes et les collectivités confrontées à ces obstacles? Quels moyens les acteurs mettent-ils en œuvre afin de faire face à cette injonction paradoxale ou encore pour transformer les éléments qui y concourent?
- Breton, M. (1999). The Relevance of Structural Approach to Group Work with Immigrant and Refugee Women, Social Work with groups, 22 (2/3), 11-29.
- Carr, S., E. (2004). Accessing Resources, Transforming Systems. In C. D. Garvin, L. M. Gutiérrez & M. Galinsky, J. (Eds.), Handbook of Social Work with Groups (pp. 360-383). New York: The Guilford Press.
- Castel, R. (2007). La cohésion sociale. Dans Castel, R., Chauvel, L., Merllié, D., Neveu, É. et T. Piketty. Les mutations de la société française (pp. 96-119). Paris : Éditions la Découverte.
- Chopart, J.-N. (2000). Les mutations du travail social. Paris : Dunod.
- LLoyd, M. (2007). Empowerment in the Interpersonal Field: Discourses of Acute Mental Health Nurses. Journal of Psychiatric and Mental Health Nursing, 14, 485-494.
- Lysack, M. (2005). Empowerment as a Relational and Ethical Stance. Canadian Social Work Review / Revue canadienne de service social 22(1), 31-51.
- Mayer, R. (2002). Évolution des pratiques en service social. Boucherville : Gaëtan Morin Éditeur. Oudshoorn, A. (2005). Power and Empowerment : Critical Concepts in the Nurse-Client Relationship. Contemporary Nurse, 20(1), 57-66.
- Paugam, S. (2004). La précarité professionnelle : effets individuels et sociaux. Entretien du CRIEVAT- Laval avec Serge Paugam. Fournier, G. et Bourassa, B. (Dir.). Saint-Nicolas, Québec : Les Presses de l’Université Laval.
- Vilbrod, A. (2003). L’identité incertaine des travailleurs sociaux. Paris : L’Harmattan
|